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mardi 29 juillet 2014

EUROVÉLO 6: LES COMMENTAIRES ET IMPRESSIONS DE LAURENCE

L’EUROVELO 6 DE DOLE À SAINT-BREVIN
DU SAMEDI 12 JULLET AU MERCREDI 23 JUILLET 2014

L’idée de ce voyage a germé dans mon esprit au printemps. J’ai décidé de partir de Dôle, la ville natale de Michèle, ma maman, pour rejoindre l’océan Atlantique à Saint–Brévin.
Je voulais faire le chemin de vie de ma maman, sur son vélo Singer, datant de 1977. Pédaler le long du Doubs, de la Saône et de la Loire pour laisser sur les chemins de halage, le chagrin de sa mort. J’avais l’espoir d’arriver à Saint-Brévin, délestée de ma peine et fortifiée par ce périple cycliste à travers la France.
Entreprendre seule,  ce périple était un choix et un défi. Au fond de moi, je nourrissais l’espoir que si je réussissais ce voyage, j’arriverai à vivre sans elle.
Partie de Labaroche le samedi 12 juillet, sur mon vélo, j’ai rejoint la gare de Colmar pour prendre 3 trains afin d’arriver à Dôle, à 13 h. Je suis passée par la vieille ville, Grand’rue dans laquelle Michèle, était née le 4 septembre 1945. J’ai également retrouvé la rue Marcel Aymé, où mes deux arrière-grand-mères tenaient un commerce. Les rues ressemblaient à mes souvenirs d’enfance et aux récits que mes grands-parents me faisaient de leurs jeunes années. Les vieux immeubles de rapport, aux façades sombres, étaient toujours debout. Une sensation de temps suspendu m’a effleurée et poussée à pédaler pour rejoindre les rives du Doubs.
J’avais 90 km à parcourir dans l’après-midi pour rejoindre Châlon/Saône, où ma grand-mère et ma tante m’attendaient. J’ai fait pour la première fois ce parcours à vélo. Je souhaitais éprouver l’effort fait mes grands-parents de nombreuses fois de 1941 à 1953 (date d’achat de leur première voiture) quand ils rendaient visite à leurs parents restés à Dôle. En voiture depuis mon enfance, je fais ce trajet deux fois par an, je m’attendais à peiner et à me languir d’arriver. Ce fut un enchantement. J’ai découvert des paysages splendides derrière des noms familiers, comme Saint-Jean de Losne et Seurre. Les rives de la Saône avec les écluses, les quais et les ponts laissent percevoir les traces d’une navigation passée dynamique et d’échanges florissants. Avec surprise, je me suis amusée des tentes et des installations des pêcheurs de carpes, venus de nombreux départements et même du Bas-Rhin.
Des bleuets bordaient le chemin de halage, traçant un fil bleu pour me guider jusqu’à Verdun/Doubs, sur l’île, où maman aimait aller.
J’ai quitté Verdun, en passant devant la place sur la quelle mon grand-père jouait à la pétanque.  J’ai revu l’ancienne maison de mes grands-parents, un lieu heureux de mon enfance. J’ai pédalé 25 km à proximité de la Saône pour rejoindre Châlon où ma grand-mère et ma tante m’ont accueillie avec joie.
De Châlon à Paray le Monial, j’ai apprécié Chagny et Saint-Léger sur Dheune. Montceau les Mines, porteuse des traces de son passé minier m’a paru plus triste. Il pleuvait sur la ville, qui se préparait à fêter le 14 juillet, j’ai pédalé avec ardeur pour m’en éloigner, la mélancolie me gagnait. La fatigue des 110km de la veille et des 60 km du jour ainsi que l’éloignement d’avec ma famille, provoquaient un coup de blues. Le doute s’installait en moi. Aurais- je les capacités physiques et la force mentale d’accomplir ce voyage ?  Je devais rejoindre une auberge à 13 km de Paray le Monial, l’étape comportait plus de 100 km, c’était un peu trop long.
Arrivée vers 18 h au Moulin des Vaux à Nochize, j’ai retrouvé le sourire. Une femme seule, avec un vélo équipé de sacoches attire la sympathie. Après un bon dîner et une nuit réparatrice, le moral était au beau fixe. Au petit déjeuner, j’ai discuté avec Eva, une femme suédoise retraitée. Elle venait ici faire de l’équitation, pour se remettre de son divorce,  en se ressourçant dans la nature. A sa question, pourquoi j’entreprenais ce voyage seule, je n’ai pas pu évoquer le décès de Maman. J’ai dit que j’avais envie de faire ce périple pour me remettre d’une année difficile.
A 9 heures, je partais en direction de Bourbon Lancy pour 70 km, en faisant un arrêt dans la belle basilique de Paray. Sur le parvis, j’ai croisé des cyclistes de l’Eurovélo 6. Un couple de la cinquantaine, originaires de Saumur, ils se rendaient à la mer Noire, pour un périple de 3 mois. Respect… j’ai pensé à mon père qui souhaite accomplir ce voyage l’an prochain.
A Bourbon Lancy, j’ai logé à l’Hôtel du Pont, à 300 mètres de la Loire. Délicieuses confitures maison au petit déjeuner.
Arrivée à Nevers, après un joli trajet de 75 km, j’ai apprécié le charme paisible de l’hôtel Beauséjour. J’ai visité le palais ducal et fait la connaissance de Christian, rédacteur de la mairie. Il m’a conseillé Nevers plage, sur les rives de la Loire. J’ai profité du soleil, de la piscine et d’un transat au pied de la vieille ville. Je n’avais pas très envie de faire étape dans une ville, mais ce fut une halte détente, culturelle et sympathique. Le soir sur les conseils de Christian, j’ai mangé au Pub du bureau, sympathisé avec Elodie et Stéphanie, mes voisines de table. Un concert de jazz années 50, a animé la place.
Nevers, la Charité sur Loire, Pouilly sur Loire, arrivée à Saint-Satur. 65 km, baignade, visite de la basilique de la Charité et de La Tour de Pouilly pour découvrir le fameux Pouilly Fumé et son terroir. Rencontre avec Claire, d’Orléans, Rémo de Berne, Charly d’Innsbruck et François de l’Essonne. Super repas au Ligérian, guinguette en bord de Loire, à côté du camping.
Saint- Satur à Sully sur Loire, 85 km. Rencontre des bizontines, Annick et sa fille Audrey, de 21 ans, de Stéphane et François, étudiants en école d’ingénieurs à Belfort et à Brest. Belle soirée au restau du camping, avec une Fejoade. Visite du château de Sully, qui mérite une halte ( superbe charpente du XV è s).
De Sully à Orléans, 50 km. Rencontre avec Alessandra, peintre italienne de Milan. Baignade à l’île Charlemagne, au sud de d’Orléans.
Train d’Orléans à Amboise. Gite Ethic, proche du centre sur l’île d’Or. J’avais le cœur un peu serré en arrivant à Amboise  car j’avais quitté mes amis cyclistes. De plus j’étais venue à Amboise en 1982 avec maman, voir un magnifique son et lumière au château d’Amboise, relatant la relation de François 1 er de Léonard de Vinci, j’appréhendais de verser dans la nostalgie. Au pied de l’imposant château en début de soirée, je peinais à retrouver ma joyeuse humeur des jours précédents. Une musique rock venue du bout de la rue a guidé mes pas, vers le café des Arts. Au soleil rasant du soir, j’ai dégusté un vouvray, qui m’a mis d’humeur à lier la discussion avec des autochtones. Superbe soirée joyeuse et d’échanges. Visite du Clos Lucé le matin, café du matin avec les Amboisiens, pique nique sur l’île d’Or.
Départ pour Tours, 46 km. Après 601 km parcourus seule, heureuses retrouvailles avec mon père chez mon ami, Sié. Soirée pizza, arrosée d’un excellent Vouvray.  Dimanche sous un ciel menaçant nous avons pris la direction de Saumur, pour faire étape à Gennes sur Loire, après 104 km, dans un paisible camping en bord de Loire. Passage dans les villages troglodytes, le vignoble, les bords de Loire, les châteaux, très beau trajet.
Des coups de cœur pour Bréhémont, Candes Saint-Martin,  Gennes/Loire, Bouchemaine ( le café de Noé), Montjean et ses sculptures géantes, Saint-Florent le Viel et la littérature de Julien Gracq, Oudon et la charmante serveuse du café du Hâvre, Paimboeuf et son passé portuaire et ses innovations artistiques.
Ce périple sur l’Eurovélo 6 est un grand et magnifique voyage. D’abord il a été un voyage intérieur avec la réminiscence d’heureux souvenirs d’enfance en Saône et Loire et à Amboise.
Ensuite fortifiée par 280 km de vélo, j’ai vécu un voyage vers les autres. Très facile quand on a le sourire, les autres sont accessibles et heureux d’échanger, de livrer quelques bribes de leur vie. Mon cœur s’est réchauffé au contact de belles personnes, insouciantes, généreuses, encourageantes, philosophes, esthètes, optimistes…Au fil de l’eau, j’ai laissé mon chagrin se disperser sur les rivages et je me suis remplie d’images de paysages, clochers, ponts, écluses, petites maisons de vieilles pierres colorées de roses trémières, jardins de grand-mère peuplés d’hortensias, de poireaux, de soucis, silhouettes d’arbres, de châteaux. Autant de traces du passé et du présent qui construisent la France, en font une terre d’accueil et de d’échanges.
Et enfin j’ai fait un voyage vers la résilience. Accompagnée par mon père, j’ai abouti à l’estuaire de la Loire, là où ses eaux se dispersent dans l’océan. Au soleil du matin ; je me suis baignée à Saint-Brévin. Un vol d’hirondelles m’a salué, l’une d’elle s’est détachée pour tournoyer au-dessus de moi. J’ai pensé à maman, je l’ai remercié de m’avoir guidée sur ce chemin. J’ai eu l’impression qu’elle avait jalonné mon voyage des personnes dont j’avais besoin et guidé vers les lieux où j’ai été heureuse avec elle.
Elle avait bien choisi mon père, il a été présent au bout de ce périple, cela m’a motivé. Elle m’a enseigné le courage et la vitalité. Merci pour la vie.

                                                                                                                                                                               Laurence


Quelques photos prises par Laurence

Nevers vue de la plage

Arrivée à La Charité sur Loire par un chemin de halage

Pont canal de Briare, construit par Eiffel

Devant le château de Sully avec une cycliste bizontine.

Le château de Sully au petit matin.

Une famille allemande avec un vélo à rallonge

La charpente du château de Sully

Vue sur la château d'Amboise, depuis le Clos Lucé

Dans le parc du Clos Lucé

Pierre, aux environs de Candé Saint-Martin
Sur un quai, à proximité de Chalonne sur Loire


Notre cabane à Gennes sur Loire, on refait le plein de sels minéraux, après 104 km.
Sur le pont entre Gennes et les Rosiers sur Loire. Sortie restaurant avec mon père, tenue correcte exigée !

Façade insolite à Paimboeuf

Coucher de soleil sur la raffinerie de Donges

Le serpent de mer à Saint-Brévin méritait bien 910 km de coups de pédales !



Après 12 jours sans véhicule motorisé, je m'autorise le bus pour relier St-Brévin à St-Nazaire.

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